Notre dossier : Enseignants en Kabylie (1ère partie)

À 23 ans, en charge de 65 élèves, commence le parcours de Victor Verdy

Franc-Comtois, natif d’Aïssey (Doubs), élève de l’école normale de Besançon (Doubs), ayant choisi la Kabylie pour exercer, Victor Verdy suit les cours de formation d’instituteurs de Fort-National, d’où est sortie une véritable élite de maîtres, admirablement préparés pour un enseignement assez particulier.

Le stage terminé V. Verdy est nommé à Michelet où il découvre bien vite que les types de ces berbères ne sont pas si différents des types de paysans français. Il voit ces fils du Djurdjura tels qu’ils sont en réalité, avec beaucoup des qualités de nos ruraux et quelques-uns de leurs défauts, assez travailleurs, très économes, même âpres au gain et à l’épargne, passionnés pour la possession de leur terre, plus soucieux de leur bétail que de leur instruction, d’ailleurs sans fanatisme religieux et capables de s’attacher à des gens qui n’auraient en vue que leur bien.

En septembre 1883, à 23 ans, Verdy est nommé à l’école récemment construite de Taourirt-Mimoun, il est en charge à cette date de 65 élèves et, sur le mur, parmi les diplômes affichés, on trouve un certificat d’études médicales signé du docteur Ramonet de Fort-National (informations données par le « journal du Fort » de 1883).

Avec son épouse originaire de Lugano, ils arrangent bien leur vie et s’y plaisent. Le pays est fertile et on trouve à bon marché le nécessaire. Bien entendu il faut faire ses provisions, avoir des conserves, car on est à trois heures à pied de Fort-National et, pendant les neiges on subit un blocus de quelques jours, même de quelques semaines, comme cela est arrivé en 1889. L’école possède un beau jardin : on peut lui faire produire les légumes et les fruits de France. V. Verdy, grand chasseur devant l’Eternel, trouve à varier ses menus avec les perdreaux dont la contrée abonde et les sangliers qui y sont devenus plus rares depuis qu’il y fait parler la poudre... Bref, avec un traitement que certains accessoires portent à 3.300 francs, le « taleb » français de la nation des Beni-Yenni peut être envié de beaucoup de ses collègues dans la métropole. Il a cinq enfants, dont le dernier est né en 1890, sur cette crête ».

Extrait de la Revue bleue, revue politique et littéraire. N°11. Septembre 1892.

En complément, lire : La Kabylie d’Hanoteau et Letourneux en 1872.

Jean-Pierre FRAPOLLI

Extrait du Mémoire Vive n°63