Conquête du Sahara et création des territoires du Sud [PARTIE 1]

Conquête du Sahara

Elle a été le prolongement de la conquête de l'Algérie. Elle prendra un demi-siècle.

La mémoire du grand commerce caravanier qui, pendant des siècles et sur de longues distances, avait relié le Maghreb et le Soudan et fait la fortune des villes situées aux « portes du désert », était très présente dans les esprits durant les années 1850. L’idée d'établir de nouvelles voies commerciales et de contracter avec les souverains locaux suscitait l’intérêt des explorateurs et des scientifiques, mais aussi de plus en plus des pouvoirs politiques.

Les premiers territoires sahariens investis seront ceux qui se trouvent au contact et directement en relation avec le Tell algérien. Biskra est occupée en 1844, Laghouat en 1852, Ouargla en 1854, El Goléa en 1873. Le Mzab, est annexé en 1882.

Mais le massacre de la mission Flatters en 1881, dont le but était d'établir le tracé d'un futur chemin de fer transsaharien, reliant l'Algérie au futur Soudan français, une idée saint-simonienne typique de cette époque, brisa bien des enthousiasmes pendant deux décennies !

Cependant, au tournant du siècle, l’intervention des militaires, qui avaient patiemment jalonné leur avancée vers le Sud par la construction de forts défensifs, modifiera la donne en obtenant d’abord la défaite des Ksouriens à In Salah en 1899, puis celle des Touaregs à Tit, en 1902. C’est alors tout le territoire du Hoggar-Tassili qui va basculer dans l'orbite algérienne. Le Tidikelt, le Touat et le Gourara seront pris en 1900. L'amenokal Moussa ag-Amastane se soumettra à In Salah au début de 1904. On retrouve sur la carte ci-dessus en bandes hachurées roses les zones sahariennes pacifiées après 1900.

Il faudra cependant attendre 1913 pour la reddition de Djanet, et 1934 pour l'occupation de Tindouf.

 

Création des Territoires du Sud

 

Saisissant l’occasion de ces victoires militaires seront créés par la loi du 24 décembre 1902 les « Territoires du Sud », placés sous l'autorité du gouverneur général de l'Algérie, assisté du Conseil de Gouvernement de l’Algérie. Cette loi fixe la composition et la limite de ces territoires. Elle les dote de la personnalité civile et leur attribue un budget autonome distinct de celui de l’Algérie.

Le décret du 14 août 1905 prévoit que ces Territoires sont administrés par l'armée. Un commandant militaire est placé à la tête de chacun d’eux qui dirige les services administratifs et militaires, sous l’autorité du Gouverneur général. Les officiers des Affaires indigènes jouent le rôle des bureaux arabes de la période antérieure à 1870. Le principe est celui de l'administration indirecte, appuyée sur les chefs traditionnels, méthode qui sera reprise par la suite dans les protectorats. De ce fait, les Territoires du Sud ne sont pas soumis au même système d’impôts que l’Algérie du Nord. Le vieux système des impôts arabes est maintenu, et les Européens qui vivent dans ces territoires y sont assujettis, comme les indigènes : impôt sur les cultures (achour), impôt sur les animaux (zekkat), impôt sur les palmiers (lezma). A noter que le décret Crémieux ne s'applique pas aux Territoires du Sud et les populations juives installées dans le Sahara depuis des siècles (1ère destruction du Temple, 6ième s B.C.) ne bénéficieront pas automatiquement de la citoyenneté française.

Pour appuyer cette administration, une nouvelle police du désert est créée : les « pelotons méharistes ». C’est le général Laperrine, nommé commandant militaire des oasis sahariennes le 6 juillet 1901, qui mettra au point les principes de fonctionnement des compagnies sahariennes dont l’existence sera rendue officielle par le décret du 1er août 1905.

Les territoires du Sud sont divisés par la loi en 4 circonscriptions, (elles-mêmes subdivisées en cercles et annexes par le décret du 12 décembre 1905 :

  • Aïn Sefra
  • Ghardaïa
  • Touggourt
  • Oasis.

Ce régime prendra fin le 7 août 1957 avec la création des deux départements « sahariens », celui des Oasis (chef-lieu : Ouargla) et celui de la Saoura (chef-lieu : Colomb-Béchar). Les zones situées au nord de l'Atlas saharien seront ensuite incluses, par la loi cadre du 5 février 1958, dans deux départements du Nord algérien, celui de Médéa (commune mixte de Djelfa) et celui de Saïda (communes mixtes d'Aïn-Sefra, Geryville et Méchéria).

Le territoire d’Aïn Sefra en 1905

Il comprend

  • le cercle de Mécheria,

             -Poste de Berguent

  • le cercle de Colomb-Béchar,

             -l'annexe de Beni Abbès,

             -Postes de Taghit et de Talzaza

            -l'annexe d'Aïn Sefra,

            -l'annexe de Beni Ounif,

  • le cercle de Géryville

           -Poste d’El Abiodh

Chef-lieu Aïn Sefra.

 

Le territoire de Ghardaïa  en 1905

Il comprend :

 

  • le cercle de Laghouat,
  • le cercle de Ghardaïa,
    • le poste d’El Goléa
  • le cercle de Djelfa,

 

Chef-lieu Laghouat.

 

Le territoire de Touggourt en 1905

 

Il comprend :

 

  • le cercle de Touggourt,
    • l'annexe de Biskra,
    • le poste des Ouled Djellal
    • l'annexe d'El Oued.

Chef-lieu Biskra

 

Le territoire des Oasis  en 1905

 

Il comprend en 1907

 

  • l'annexe du Tidikelt,
  • l'annexe du Touat,
  • le poste de Gourara (Timimoun)

 

Chef-lieu Adrar

 

 

La frontière entre les Territoires du Sud et la Libye italienne résulte d'une convention franco-britannique du 14 juin 1898. La frontière entre les Territoires du Sud et le Sahara espagnol est fixée par une convention du 27 juin 1900. En 1904, une rencontre entre militaires français de l'Algérie et du Soudan a lieu dans l'Adrar des Ifoghas et définit la frontière entre ces deux pays.

Au total, l’ensemble des Territoires du Sud représente, en 1905, une population de 370.709 habitants pour une superficie de 1 981 750 km² soit 0,19 habitants par km2.

 

Jean-Pierre SIMON

Rendez-vous la semaine prochaien pour la partie 2 !